L'accessibilité : un outil de compréhension et de conception

Le , par Élie Sloïm - Accessibilité

Avertissement : cet article a été publié en 2014. Son contenu n'est peut-être plus d'actualité.

Aujourd’hui c’est le GAAD (Global Accessibility Awareness Day). À cette occasion, en direct du train qui me conduit à Paris, j’avais envie de vous parler de l’intérêt de l’accessibilité.

Il est très facile de relier l’accessibilité au handicap. C’est intellectuellement confortable, mais c’est largement insuffisant. Depuis plusieurs années, nous savons que l’accessibilité n’est pas que pour les personnes handicapées.

L’accessibilité c’est autre chose. C’est aussi un outil de compréhension du Web, un outil qui permet d’actionner l’empathie. À ce titre, c’est un magnifique outil de conception. Dans ce bref billet, je vais vous expliquer, non pas en quoi l’accessibilité sert aux autres, quels qu’ils soient — ce qui est vrai — mais surtout comment et pourquoi le concept et la vision accessibilité peuvent vous permettre de vous améliorer professionnellement.

Ce qui reste quand on a tout oublié

Pourquoi croyez-vous que nous montrons souvent des utilisateurs non-voyants pour faire comprendre l’accessibilité ? Parce que la démarche accessibilité s’adresserait aux seuls non-voyants ? En raison d’une sensibilité particulière aux aveugles ? Pas du tout. Il y a une première raison, très simple : vous faire comprendre qu’il n’y a pas qu’une seule façon d’accéder aux contenus Web et que des technologies d’assistance fonctionnent et sont parfaitement utilisables. Surtout, il y a une seconde raison, selon moi plus importante : écouter le rendu d’un site Web dans un lecteur d’écran, c’est écouter l’essentiel, sa substantifique moelle. C’est ce qui reste lorsqu’il ne reste que ce qui ne peut pas et ne doit pas être enlevé, à savoir les contenus et les services. Assurer l’accès aux contenus et services, c’est viser le socle fondamental, c’est la garantie que votre approche professionnelle est solide et rationnelle.

La conception centrée sur l’essentiel

Vous avez peut-être entendu des approches de conception first, notamment mobile first. L’accessibilité conduit également à orienter la conception sur l’essentiel, sur ce qui ne peut pas être passé sous silence, sur ce qui ne peut pas ne pas être vu, perçu.

La conception universelle et l’indépendance aux périphériques

Penser accessibilité, c’est lâcher prise sur les contextes d’usage. C’est accepter que le nombre de configurations est infini, et que professionnellement, avant d’assurer un maximum, il faut assurer le minimum. Le minimum, c’est pouvoir utiliser uniquement un périphérique d’entrée comme le clavier ou un mécanisme similaire pour explorer et consulter le contenu d’une page Web. C’est aussi anticiper la navigation en contexte mobile, tactile — et qui sait d’autres qui ne sont pas encore inventées. Dès lors que la conception prévoit une navigation qui ne dépend pas de l"utilisation d’un périphérique comme la souris, voire du survol à la souris, le site Web est utilisable pour tous.

L’importance de la structure

Faites une expérience : fermez les yeux et demandez à un collègue de vous raconter une page Web devant laquelle il se trouve. Vous aller pouvoir vérifier que percevoir l’essentiel d’une page, c’est tout d’abord connaître le titre, les sous-titres, les liens, les actions possibles. La pensée accessibilité fait naturellement ressortir la structure. C’est fondamental dans la conception Web, mais aussi lorsqu’il faut parler, écrire, communiquer. C’est un exercice très enrichissant.

La prévention des risques

Penser accessibilité, c’est penser aux risques. C’est imaginer ce qui pourrait se passer dans des contextes que l’on ne maîtrise pas et que l’on ne connait pas. Un professionnel qui ne maîtrise pas les risques de son métier est un amateur.

Une vision positive de la contrainte

Les plus grands professionnels ne sont pas les esprits les plus libres mais ceux qui sont capables d’exercer et de s’épanouir dans la contrainte. Un grand médecin n’a pas forcément intérêt à être le plus créatif lorsque qu’il délivre une ordonnance. Il est quelquefois nécessaire de maîtriser les contraintes ; celui qui accepte cet état de fait est un homme (ou une femme) de l’Art. L’accessibilité fournit très souvent des contraintes utiles et bénéfiques. Elle aide à rationaliser les processus, elle conduit à inventer des façons de faire répétables et universelles. Bien loin de conduire à faire moins, elle conduit à faire mieux avec moins.

L’empathie

Penser accessibilité, c’est penser à l’autre, évidemment. C’est aussi penser à soi ou à l’état dans lequel on peut se retrouver de manière temporaire ou définitive. En ce sens, penser accessibilité, c’est se projeter dans l’avenir, pour les autres et pour soi ; c’est se voir rappeler en permanence que l’état des personnes et du monde doit être vu de façon dynamique et non statique. Penser accessibilité, c’est actionner l’empathie et l’écoute, l’une des premières qualités d’un professionnel, surtout dans des domaines reliés à la communication.

Voilà, je vous souhaite une belle journée.